Où Draco gazouille et Harry rumine
rating: K+
note: la chanson "Le plus beau du quartier" est de Carla Bruni ..
« Regardez-moi,
je suis le plus beau du quartier... lalala palam pam padampam... »
Draco entra dans le bureau tout en se dandinant allègrement
sur cette fameuse chanson qui passait sur toutes les radios. Et oui,
notre cher sorcier, jadis si fier de la pureté de son sang,
habitait désormais dans le Londres moldu et arrivait au
Ministère tous les matins en métro! Comme quoi, tout
peut arriver.
Ce
matin, donc, notre personnage cité ci-dessus passa la porte de
son bureau en chantonnant cette rengaine française. « Est-ce
la grâce anglo-saxonne de ma cambrure... Oh! Bonjour Harry!
Comment ça va ce matin? Padam pam, lalala... »
Ledit Harry regardait son collègue avec des yeux grands comme
des soucoupes. Qu'il soit aimable et de bonne humeur le matin, passe
encore. Mais qu'il chante? Et une chanson moldue de surcroît!
Les poules allaient bientôt avoir des dents, il le sentait. Il
faudrait qu'il aille voir où en étaient les jumeaux
Weasley dans leurs expériences, quelque chose ne tournait pas
rond...
Draco
ne s'était rendu compte de rien et poursuivait sa chanson. Il
jeta son imperméable sur sa chaise et lança habilement
son feutre sur la patère, accrochée derrière la
porte. « Et dix points pour Draco Malfoy! Draco Malfoy est
déclaré champion du monde de lancer de chapeau!
Regardez-moi, je suis le plus beau du quartier... padam pam... »
Harry soupira, puis, se reprenant brusquement, réalisa que son
voisin de bureau lui avait posé une question.
« Bonjour
Draco. Disons que ça peut aller. Mais dis-moi, tu as l'air en
forme aujourd'hui! Que t'arrive-t-il? Tu as soudainement appris que
tu étais nommé directeur à la place du
directeur?
- Hum?
Non, non, rien de tout cela. Disons que pour une fois je ne me suis
pas trompé de pied en me levant! » Ce disant, il
s'était approché du bureau de Harry. Il semblait
chercher quelque chose, lorsque brusquement, il se tourna vers son
collègue: « Mais prenez garde à ma beauté,
à mon exquise ambiguïté! Je suis le roi du
désirable, et je suis l'indéshabillable... »
Ses yeux pétillèrent d'une drôle de lueur. Harry
déglutit.
« Tu
la sors d'où cette nouvelle chanson? demanda-t-il en essayant
de reprendre contenance.
- Ne me
dis pas que tu n'as jamais entendu parler de Carla Bruni! C'est une
chanteuse française, à la voix superbe – sa voix vaut
presque la mienne – et qui passe en boucle dans le métro, à
la radio et tout et tout! Franchement Harry, ça ne te réussit
pas de vivre dans le monde sorcier. Tu ferais bien de penser
sérieusement à déménager du côté
moldu! La vie est plus belle sans magie! » Et Draco s'en
retourna à son bureau, se lançant dans la rédaction
de sombres rapports ou autres tâches sans importance.
« J'suis
l'favori, le bel ami, de toutes ces dames, et d'leurs maris... hum,
Regardez-moi! Lalala... » C'est ainsi que ce déroula
la matinée. Les deux hommes étaient plongés dans
leur travail jusqu'au cou, Draco chantait, les oiseaux gazouillaient,
le soleil brillait et le ciel bleuissait. Puis à midi, Harry
leva les yeux vers la pendule avec un soupir de soulagement. Enfin,
il allait avoir deux heures pour souffler, deux heures sans entendre
cette chanson. Il n'en pouvait plus! Il allait finir par commettre un
meurtre...
« Tu
déjeunes avec moi? demanda, affable, Draco.
-
Euh...
- Je
vois que tu es toujours aussi communicatif! Quel charisme Mr Potter,
vous m'étonnez, franchement! » Voilà qui
ressemblait déjà beaucoup plus au Draco made in
Malfoy.
De plus, pouvait-il refuser une invitation à déjeuner,
quand elle était demandée avec un tel sourire?
Vingt minute plus tard, ils entraient
dans un restaurant indien. Draco avait réussi à
persuader son collègue de se rendre du côté
moldu, afin qu'il découvre un délicieux petit
restaurant indien dont il lui dirait des nouvelles. On avait vu
discussion plus animée qu'à cette table: les deux
hommes se regardaient depuis de longues minutes en chiens de faïence.
Puis, sans prévenir, Draco entonna: « Les
bons messieurs, eux voudraient tellement m'déshabiller, ça
les obstine...
- Oh arrête! C'est
insupportable à la fin!
- Comment? Harry, tss
tss... On ne t'a jamais appris à être poli? On dit
''s'il-te-plaît mon petit Draco que j'aime''.
- ... » Mais
que se passait-il dans la tête blonde qui se trouvait en face
lui? Ou plutôt, que s'était-il passé? Quelqu'un
lui avait lancé un sort, ce n'était pas possible
autrement. Ou alors il avait raté une potion qu'il aurait bue,
mais Draco ratait rarement une potion. Ou alors... Pendant que Harry
cogitait, l'objet de ses pensées s'était de nouveau
lancé dans l'interprétation cette chanson.
« Observez-moi,
de haut en bas, vous n'en verrez pas deux comme ça... pampadam
pam...
- Draco, s'il-te-plaît,
cesse de chanter ce truc. Je n'en peux plus et si tu continues, je
m'en vais! Les commandes ne sont pas encore arrivées, je
pourrais très bien m'en aller sur-le-champ. » Draco
haussa un sourcil dubitatif, un brin moqueur, et, comme pour
contredire Harry, le serveur arriva, apportant les assiettes. Harry
se renfrogna et un grand sourire illumina le visage de sons
vis-à-vis.
« Dès
qu'on me voit, on se sent tout comme envoûté, comme
charmé... hum hum » Draco avait murmuré ces
quelques paroles, observant son voisin de table avec un étrange
pétillement au fond des yeux. Harry déglutit. Pour la
deuxième fois de la journée.
« J'ai dit
s'il-te-plaît...
- Mais tu as oublié
la suite! Tss tss... Harry, voyons, tu n'es pas raisonnable! Je sens
que tu es à cran. Pourquoi ne fais-tu pas ce que je demande?
Tu serais tranquille pour l'après-midi...
- Qui me dit que tu ne
recommenceras pas juste après?
- Dois-je te rappeler que
je suis quelqu'un de parole? Non, franchement Harry, tu me blesses. »
rétorqua Draco, feignant la pâmoison, un air exagérément
outré sur son visage.
« Et qui te
dit que j'ai envie de te murmurer des mots doux?
- Et qui me dit que tu
n'en meurs pas d'envie? » La voix de Draco s'était
faite enjôleuse. Harry dégl... Non! Il allait se
reprendre, il le fallait! Par chance, Draco n'avait pas encore
appris à chanter la bouche pleine tout en restant digne, c'est
pourquoi il se tut durant le reste du repas. Sur le chemin du retour,
Harry se tint suffisamment éloigné de lui pour
n'entendre que quelques bribes, mêlées au brouhaha des
rues de Londres. De retour au Ministère, il donna à son
collègue une vague excuse et s'enfuit retrouver son amie de
toujours à l'étage de la recherche en runes et langues
anciennes. Il retrouverait Draco plus tard.
« Harry! Comme
je suis contente de te voir! Voilà un bout de temps qu'on ne
t'a pas vu traîner dans le coin. » Ledit Harry
marmonna un vague ''J'avais du boulot'' mais Hermione ne dut pas
l'entendre et poursuivit sur sa lancée: « Tu ne
devineras jamais ce que j'ai découvert la semaine dernière!
Je suis maintenant sur une piste plus qu'intéressante: il
semblerait que l'article et le relatif aient la même racine en
grec, et cela coïnciderait étrangement avec la
morphologie première de l'adjectif démonstratif en
gaélique et... » Harry n'écoutait déjà
plus. Il était content que son amie soit heureuse dans son
travail (même si elle persistait à clamer que ce n'était
pas du travail puisqu'elle y prenait plaisir) mais n'avait jamais
rien compris à ses discours sur les cas et modes d'autres
temps.
« Oh mais
c'est bien tout ça! Dis Hermione, tu n'aurais pas une idée
qui puisse m'aider?
- De quoi s'agit-il? »
En entendant le mot ''aide'', le jeune femme avait tout de suite
cessé son laïus et ouvert grand ses oreilles –
Gryffondor un jour, Gryffondor toujours. Son ami lui expliqua la
situation, l'étrange bonne humeur de Draco, sa chanson
insupportable et la proposition pour le moins insolite qu'il lui
avait faite.
Un quart d'heure plus
tard, Harry ressortait du bureau de la linguiste, satisfait. Après
avoir erré pendant une bonne demi-heure dans les couloirs du
Ministère, être entré par erreur dans une
demi-douzaine de bureaux, avoir demandé son chemin à
plus d'une dizaine de personnes, il entra enfin dans son bureau.
« ... belles
victimes, voudraient se pendre à mes lacets, ça les
abîme.... » Comme si de rien n'était, Harry
s'assit à sa table de travail et se plongea dans le dossier,
particulièrement énorme, qui n'attendait que lui. À l'autre bout de la pièce, Draco avait levé
les yeux sur son collègue, tout en poursuivant son oeuvre
lyrique. Harry n'avait pas réagi et une faible lueur de
déception passa dans son regard. Puis il se replongea dans son
travail, toujours en chantant.
De temps en temps, il
percevait un froissement de feuilles un peu plus violent que les
autres, Harry sortit à plusieurs reprises du bureau. Ses
gestes étaient un peu brusques. Draco savait qu'il allait
craquer. Mais jusqu'au bout, son collègue tint bon. Il
n'ouvrit pas a bouche, si ce n'est pour lui proposer un chewing-gum.
Draco avait répliqué qu'il avait compris son petit jeu,
mais ne se laisserait pas avoir. Il refusait parce que cela n'était
pas élégant et gâtait la dentition, non pour
autre chose: un chewing-gum n'avait jamais empêché
personne de chanter.
Enfin, au grand
soulagement de Harry, l'horloge du bureau sonna dix-sept heures. Avec
un soupir de contentement, il mit un peu d'ordre sur son bureau,
s'étira et bailla bruyamment. Pendant ce temps, Draco faisait
de même, et s'était lancé dans une reprise
intégrale de la chanson.
« Regarde-moi... »
Harry s'approcha de lui doucement. Plus près encore, et
lorsque leurs manteaux se frôlèrent: « Draco? »
L'interpelé se retourna, tout en articulant davantage. « Je
suis le plus b... » Ses yeux s'écarquillèrent
lorsqu'il fut bâillonné par une bouche affamée.